Storytelling, l'arme de séduction massive



Pour être un homme politique il faut certes avoir un ego surdéveloppé mais aussi une ambition dévorante, de celle qui vous fait accepter toutes les bassesses pourvu que l'ivresse du pouvoir soit au rendez-vous. Il faut également être capable de s'isoler sur le plan émotionnel pour ne pas voir le regard des autres. Sauf les regards de ceux qui vous regardent avec un air adorateur tel qu'il est évident que ceux-là ne pourraient concevoir leur existence sans vous, ceux dont le regard brille rien qu'en entendant prononcer votre nom. Et ils sont légions, plus ou moins anonymes eux aussi...

L'ego sur-développé est ce qui permet à l'homme politique de piétiner sans aucun regrets, presque distraitement, les lois, les individus et au passage la morale. Il protège du ridicule qui normalement ne tue pas sauf en politique. Et encore, selon un principe sélectif Darwinien, le ridicule ne tue que les plus faibles. Ceux qui y survivent font partie de l'élite des "survivants" et en ressortent plus forts, capable de tout sans aucune gêne. C'est le grand bal des égos...

L'ambition est le moteur de l'homme politique. Elle est à la fois créatrice et force de destruction.
Créatrice parce qu'elle force a chercher à se dépasser pour montrer combien on est différent (et combien meilleur) que son voisin pour attirer le regard du public sans lequel l'homme politique n'existe pas. Des lois ont été imaginées par ce principe.
Force de destruction car pour exister l'homme politique est prêt a tout faire, tout dire, à se contredire mais il faut briller à tout prix, "buzzer" diront les communicants. Mais pas que...

Depuis les années 90, un concept marketing à été développé en politique comme dans bien des secteurs, il s'agit du Storytelling ( littéralement, raconter une histoire ). Il s'agit d'une technique consistant à fabriquer un personnage et son histoire au gré des besoins. Parfaitement préparée et travaillée, cette histoire fictive tend à se substituer à l'histoire réelle. Notre Président, du moins ses communicants, s'y essaye comme le prouve la Timeline de Nicolas Sarkozy . 

La Timeline ( ligne de temps ) est une nouvelle fonctionnalité du réseau social Facebook qui permet à l'utilisateur de mettre sa vie à nue depuis le moment qu'il choisi et en continu dans le présent. Dans notre exemple, vous pouvez découvrir avec stupéfaction que notre président à pris des cuites et savoir quand et pourquoi. Vous naviguerez avec délice dans l'intimité de la vie de cet être supérieur ( seulement de par ses fonctions...). Au final, vous risquez même de le trouver sympathique, voir proche de vous, avec des points d'intérêts communs ( bien évidemment évoluants en même temps que les vôtres et que l'actualité ! ). C'est exactement le but recherché: fusionner de façon inconsciente votre vie et la sienne, créer une intimité que n'ont pas les autres et que vous votiez pour cet homme bon et si proche de vous. En oubliant du coup qu'il a prouvé exactement le contraire depuis 5 ans !

Un professeur de journalisme a écrit un essai, "the Power and the Story" qui examine les présidences américaines de Georges Washington à Georges W. Bush ( reconnu comme expert en matière d'histoires fictives devenant réelles ):
"Depuis les origines de la république jusqu'à nos jours" observe-t-il "ceux qui ont cherché à conquérir la plus haute charge ont dû raconter à ceux qui avaient le pouvoir de les élire des histoires convaincantes sur la Nation, ses problèmes et, avant tout, sur eux-mêmes. Une fois élu, la capacité du nouveau Président à raconter la bonne histoire et à en changer à chaque fois que c'est nécessaire est une qualité déterminante pour le succès de son administration. Et quand il a quitté le pouvoir, après une défaite ou à la fin de son mandat, il occupe souvent les années suivantes à s'assurer que sa version de sa présidence est bien celle qui sera retenue par l'Histoire. Sans une bonne histoire, il n'y a ni pouvoir, ni gloire ! "
La vie politique est donc un scénario en permanence remanié et adapté mais dont les moindres détails sont ( presque ) toujours écrits d'avance.

A la lumière de cette mécanique, on peut comparer le rôle du Président à celui d'un chef d'orchestre. Veillant à maintenir un état de tension, il tente de coordonner le concert hurlant de la meute de loups assoiffés de pouvoir pour son propre bénéfice, une version moderne du "diviser pour mieux régner".

Ainsi donc, le claquage de porte de l'UMP par Yves Jégo, trahissant le Président pour mieux re-trahir Borloo, inventant une vrai- fausse nouvelle idée de produire français ( idée qui date de 50 ans ) et jouant avec son parc Napoléon : tragi-comique; Boutin menaçant d'une "bombe atomique" le Président : burlesque. ( D'autant plus que la bombe en question serait une grève de la faim...), des visites de chantier ou d'écoles truquées...

On attend le troisième psychodramaturge: Bayrou, Morin, Villepin, Borloo... les candidats sont nombreux pour aider notre pays à conquérir le triple A de la présidence la plus manipulatrice.

Il nous appartient, à nous les citoyens anonymes, d'être vigilants, de dénoncer et de refuser ces pratiques. Et le moment venu, de manifester notre besoin de changement.

Citation d'un homme politique expert en storytelling et qui tient lieu de référence:

"La vérité doit s'inspirer de la pratique. C'est par la pratique qu'on conçoit la vérité. Il faut corriger la vérité d'après la pratique"  Mao-Tsé-Toung.

Luttons.

Le Trublion.

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